<author>Heloise Torck</author>
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<edition><date>2020-10-03</date></edition>
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<head><ref target="http://peel.library.ualberta.ca/newspapers/PDW/1920/06/16/3/">Aime Dieu et va ton chemin</ref>, <hi rend="italic">Le Patriote de
l'Ouest</hi>, 16 juin 1920, p. 6. </head>
<p>C’est par une belle nuit de septembre 1870… Au ciel bleu sombre scintillent
de rares étoiles. Sur le Pinchio, l’une des sept collines de Rome, C. le
jeune zouave pontifical de dix-sept ans, le lourd fusil sur l’épaule, monte
la garde.</p>
<p>Tout en ayant l’œil au guet, il laisse volontiers sa pensée voyageuse
traverser l’Océan et retourner là-bas au pays natal, le cher et lointain
Canada où ses parents, en ce moment, prient pour lui, sans doute. Les
reverra-t-il jamais?... Une vive émotion saisit le jeune brave…</p>
<p>Il se revoit, à quelques mois en arrière, élève du Séminaire, vibrant
d’enthousiasme sous la parole chaude, entraînante de l’abbé M…, venu, au nom
du vénéré Pie IX, faire un dernier appel à la jeunesse canadienne afin de
l’enrôler sous le drapeau papal pour la défense des droits de l’Église.</p>
<p>Au récit des souffrances du Très Saint Père, un frémissement de sainte
indignation a soulevé l’auditoire ; le souffle divin du sacrifice qui fait
les martyrs enflamme plusieurs jeunes cœurs…. Ils jurent d’aller à Rome
verser leur sang, s’il le faut pour cette noble cause. L’un vend sa montre,
l’autre ses habits afin d’endosser l’uniforme glorieux des soldats du Pape.
C… est du nombre. Il se heurte d’abord à la volonté de ses vieux parents
car, bien que fervents catholiques, ils envisagent avec terreur pour ce fils
aimé les dangers de la mer, de la vie de caserne, et surtout les dangers
d’un champ de bataille si éloigné…. Ils hésitent à prononcer l’adieu
peut-être éternel, mais le blond C… plaide sa cause avec tant d’ardeur qu’il
obtient enfin le consentement désiré.</p>
<p>Après cette première victoire, il se hâte de rejoindre ses compagnons
d’armes, anxieux de voir la Ville Éternelle et le Pape, impatient aussi de
se mesurer avec l’ennemi. Plein de confiance en l’Étoile de la Mer, il
affronte les périls d’une longue et pénible traversée.</p>
<p>À Marseille, où il arrive sain et sauf, il voit enfin Rome !.... Il foule ce
sol qui a bu le sang des martyrs, il contemple la plus haute autorité de la
terre, l’auguste Pie IX…. Quel bonheur !.... En ce moment, C… croit sentir
encore sur sa tête la main paternelle qui le bénit avec amour, le laissant
tout ému de sa bonté et plein d’ardeur pour défendre la cause papale…</p>
<p>Soudain un léger bruit le tire de sa rêverie : </p>
<p>― Qui va là, s’écrie-t-il.</p>
<p>― Vive Pie IX ! répond l’arrivant, un camarade venant le relever de sa
faction.</p>
<p style="text-align: center;">* * *</p>
<p>Les Piémontais sont dans Rome…. Napoléon III, empereur des Français, a cédé
aux influences maçonniques et abandonné la défense du Saint-Siège.</p>
<p>Chaque jour, un envoyé de Victor-Emmanuel, l’usurpateur italien, vient
parlementer avec les autorités du Vatican, espérant décider le Saint-Père à
capituler en livrant Rome aux ennemis. Mais le Souverain Pontife, fort de
son droit, ne se laisse influencer ni par les prières, ni par les
menaces.</p>
<p>À l’aurore du 20 septembre, un terrible combat s’engage…. L’auguste Pie IX,
l’âme en prières et le cœur déchiré, suit les péripéties émouvantes de cette
lutte inégale…. D’avance, il voit le sang généreux de ses héros canadiens et
autres arroser à son tour cette terre de martyrs…. Vers 10 heures du matin,
les Piémontais ont réussi à faire une immense brèche dans les murs de Rome.
Ils vont être victorieux…. Pie IX, ne voulant pas sacrifier inutilement ses
braves défenseurs, donne l’ordre de hisser le drapeau blanc…. Il se rend et
accepte par là de devenir le Prisonnier du Vatican…</p>
<p>Selon l’une des conditions, les honneurs militaires sont rendus aux Zouaves
sur la place Saint-Pierre. Un autre groupe de Zouaves, dont C… fait partie,
combattant sur le Pinchio, loin d’avoir ces honneurs, sont maltraités par
les Garibaldiens qui leur tirent la barbe et les injurient de toutes les
façons. Ils trouvent enfin un abri dans une ancienne propriété des Jésuites,
en attendant d’aller rejoindre les autres prisonniers.</p>
<p>Après avoir été incarcérés quelques jours aux casernes, ils sont dirigés sur
Civita-Vecchia, où se fait le partage des soldats par nationalités. Les
Canadiens sont transportés à Livourne où les attendent de nouvelles
tribulations : les Italiens, ne voulant pas les reconnaître comme sujets
britanniques, parlent de s’en débarrasser en les jetant à la mer!....
Devenir la proie des requins après avoir offert sa vie pour l’Église… quelle
dérision! Après avoir laissé entrer dans son cœur la douce espérance de
revoir sa patrie, quel mauvais rêve!...</p>
<p>Par bonheur l’arrivée du consul anglais y met fin : prenant les Canadiens
sous sa protection, il les envoie en Angleterre. Traversant la France, ils
la trouvent bouleversée par une terrible révolution. </p>
<p>Au moment d’aborder à Liverpool, un épais brouillard menace de faire échouer
le navire sur les côtes d’Irlande. Grâce à l’habileté des navigateurs et,
nul doute aussi, aux prières et promesses des Zouaves, ce danger est
évité.</p>
<p>La population catholique de Liverpool reçoit les Zouaves, comme des héros et
des martyrs. De vieilles femmes leur baisent les mains et font toucher aux
habits de ces braves leurs objets de piété. Ils assistent en corps à une
messe d’action de grâces, puis se dispersent pour prendre un peu de repos
dans les familles où l’on veut bien les accueillir. C… et quelques-uns de
ses compagnons trouvent asile chez une riche dame (Mme James Charnock).
Voyant en eux des défenseurs du Pape, elle les traite avec la plus grande
bonté.</p>
<p>Quelques jours plus tard, les Zouaves Canadiens, au nombre de
deux-cent-cinquante, se retrouvent à bord de « l’Idaho », en route pour le
pays aimé, le Canada, dont le nom seul fait tressaillir leurs cœurs de joie,
d’orgueil et d’espoir. </p>
<p style="text-align: center;">* * *</p>
<p>À Montréal, le jour de la Toussaint, Mgr Bourget monte en chaire avec une
grande tristesse et fait part à ses ouailles de l’affreuse rumeur : « Une
effroyable tempête a sévi en mer… « L’Idaho » devait être depuis longtemps
au port… Aucune nouvelle n’est parvenue… Nos nobles Zouaves ont dû
périr… »</p>
<p>Sa Grandeur recommande aux prières l’âme de ces pauvres naufragés. La
terrifiante nouvelle se répand dans la ville, les faubourgs et les campagnes
environnantes, portant l’anxiété et la désolation chez les parents et amis
des malheureux.</p>
<p>Les prières redoublent avec l’espérance qui ne renaît que pour s’étendre à
mesure que le temps passe…. Sept longs jours s’écoulent aussi en une
mortelle angoisse…</p>
<p>Enfin de New-York arrive le vivifiant message : « « L’Idaho » est
signalé! »…</p>
<p>Après avoir été ballotés durant dix-huit jours sur une mer en furie, les
Zouaves sont revenus, l’âme remplie de reconnaissance envers Notre-Dame du
Bon Secours qui les a sauvés du naufrage. Un exvoto en argent massif
représente « l’Idaho » ira bientôt, à l’église de N.-D. du Bon Secours, dire
aux générations présentes et futures la vénération des Zouaves pour la Reine
du Ciel.</p>
<p>À Montréal, les foyers canadiens, si hospitaliers, s’ouvrent pour ces braves
exténués de fatigue et d’émotion. À l’un d’eux, C…, conduit par la
Providence, rencontre la jeune et vertueuse orpheline destinée à devenir,
plus tard, la fidèle compagne de sa vie.</p>
<p style="text-align: center;">* * *</p>
<p>De nombreuses années ont passé…. Le jeune C… après avoir repris et terminé
ses études, a fondé un foyer, élevé chrétiennement une nombreuse famille.
Citoyen intègre, honorable et honoré, fervent chrétien, toujours il a donné
l’exemple de toutes les vertus. Ses cheveux ont blanchi, mais sur sa
poitrine autrefois offerte aux balles Garibaldiennes, brille aujourd’hui à
côté de la médaille
<hi rend="italic" xml:space="preserve">Bene Merenti, </hi>l’étoile des <hi rend="italic">Chevaliers de l’Ordre de Pie IX.</hi></p>
<p>Il fait honneur à sa religion, à sa patrie et à sa race, parce qu’il sait
rester fidèle à sa belle devise de Zouave Pontifical : <hi rend="italic">Aime Dieu et va ton chemin!</hi> »</p>
<p style="text-align: right;">Dan <hi rend="smallcaps">L’Ombre</hi></p>
<p>Edmonton, juin 1920.</p>
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